Jean-Yves Le Drian : « le sommet de N’Djaména doit être le sommet du sursaut diplomatique, le sommet du sursaut politique et le sommet du sursaut du développement »
Ce mardi 9 février 2021, à la demande de la Commission des Affaires étrangères et de la Défense, les ministres français des Armées et de son homologue des Affaires étrangères ont été auditionnés par les sénateurs sur le bilan et les perspectives de l’opération militaire « Barkhane » qui mobilise 5 100 hommes au Sahel, à quelques jours de l’ouverture du sommet du G5 Sahel à N’Djamena.
« Le sommet de Pau (France) a été le sommet du sursaut militaire, le sommet de N’Djaména doit être le sommet du sursaut diplomatique, le sommet du sursaut politique et le sommet du sursaut du développement afin de consolider les résultats des derniers mois », a déclaré Jean-Yves Le Drian, ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères.
Nous pensons que le « sursaut politique » doit être concrètement un sursaut démocratique et de bonne gouvernance dans les Etats sahéliens. Et la bonne gouvernance exige un dialogue organisé et permanent entre les acteurs politiques, une allocation efficace des ressources publiques, une stratégie tous azimuts de lutte contre la corruption et les détournements de deniers publics, une justice compétente et impartiale, une politique pour la promotion de la femme, …
La crise sécuritaire dans le Sahel tire sa source essentiellement dans le sentiment d’exclusion qui prévaut à l’échelle des communautés nationales et transnationales, selon un rapport de l’ONG International Crisis Group.
Au Tchad, Etat pivot régional de la lutte contre le terrorisme, le sentiment d’exclusion est palpable chez les cadres diplômés qui sont écartés de la gouvernance du pays et chez les populations du nord, où l’Etat tchadien a complètement disparu. En 30 ans de pouvoir sans partage, Monsieur Idriss Déby a verrouillé tout le processus démocratique et a installé dans notre pays un système oligarchique militaro-ethnique essentiellement analphabète, docile et loyal, où aucune compétence n’est promue et aucune voix discordante n’est tolérée.
Dans un « sursaut diplomatique », la France et ses alliés doivent maintenant encourager les États sahéliens à engager un dialogue inclusif avec les partis politiques, les politico-militaires et la société civile, et doivent aussi aider ces pauvres états à restaurer le service public dans toutes les zones de crise.
Comme le recommande si bien International Crisis Group, les opérations militaires sont importantes mais doivent être au service d’une telle approche. Un cap a été franchi dans la lutte contre le terrorisme. Il faudra maintenant combattre les causes de la crise sécuritaire si l’on veut préserver la stabilité du Sahel.
C’est pourquoi, nous réitérons, une fois encore, notre appel pour l’implication et l’appui de la France, des États-Unis, de la Russie, des Nations Unies, de l’Union Européenne, de l’Union Africaine et de tous les pays amis du Tchad pour que tous les acteurs tchadiens s’engagent dans un processus de dialogue politique constructif, sincère et franc pouvant conduire à la réconciliation nationale.